Est-ce qu’il y a un métier exercé par des femmes, dont on n’entend jamais parler ? Je me suis posée cette question pour ma série sur les femmes invisibles et j’ai pensé : agricultrice ! C’était un défi pour moi car je suis assez représentative du public urbanisé ignorant – ou presque – du monde agricole. Il m’a donc fallu lire des articles, réécouter des émissions de radio ou des podcasts et acheter la bande dessinée « Algues vertes » qui, avec les illustrations de Pierre Van Hove, retrace l’enquête d’Inès Léraud sur le phénomène des algues vertes en Bretagne. Cette BD permet de comprendre comment et pourquoi l’agriculture bretonne s’est transformée en agriculture intensive non respectueuse, ni des animaux, ni des paysans-annes, ni de celles et ceux qu’elle doit nourrir ! 

J’ai aussi appris que le quinquennat du président Macron a été marqué par une rupture : en 2017, il s’agissait de repenser la nouvelle France agricole, de rééquilibrer les rapports de force avec la filière agro-alimentaire et la distribution et d’assurer une montée en gamme et une meilleure alimentation. Plus tard, on a pu déplorer la dérogation pour les insecticides tueurs d’abeilles, les néonicotinoïdes, sur les cultures de betteraves et la disparition de la promesse d’interdire le glyphosate. Le « produire plus » a remplacé le « produire mieux ».

Le témoignage de l’invitée de cet épisode, Valérie, paysanne bio âgée de 53 ans qui élève avec son conjoint une cinquantaine de vaches laitières dans une ferme proche de Brest, n’en est que plus intéressant. À cause de l’urbanisation tentaculaire de l’agglomération brestoise qui réduit inexorablement la surface de leur exploitation, Valérie a choisi de diversifier son activité : elle gère un atelier de production de yaourts bio qui sont distribués dans les cantines scolaires, fait de la vente directe de ses produits et organise avec des associations locales des animations pour enfants ou publics vulnérables.

Elle est très investie dans de nombreux combats : elle lutte contre l’artificialisation des terres agricoles, se mobilise pour que les enfants puissent bénéficier d’une alimentation saine dès leur plus jeune âge et est très engagée sur le territoire. Malgré un emploi bien chargé, elle a accepté des responsabilités à la FNAB, Fédération nationale de l’agriculture bio, où elle participe à des actions menées pour faciliter le travail des femmes car elle pense que ce sont les femmes qui, je la cite, « feront bouger les choses et seront actrices de la protection de l’environnement ». Franchement, Valérie, il suffit de t’écouter pour en être convaincu !

Références

Les Elles de la Terre

La ferme de Traon Bihan , exploitation biologique brestoise de Valérie et Philippe Lazennec

Fédération nationale agriculture biologique

France Bleu Lorraine le 22/1/22
Quelle est la place des femmes dans l’agriculture biologique ?   

Les algues vertes, l’histoire interdite
Bande dessinée d’Inès Léraud et de Pierre Van Hove publiée dans la Revue dessinée