J’ai fait la connaissance de Sylvie en mars 2020, quelques jours après l’annonce du premier confinement. Après quelques mois infructueux de recherche d’emploi dans les conditions qu’on peut imaginer, Sylvie en juillet 2020 a rejoint une grosse association de Montélimar où elle exerce le métier d’aide à domicile. Quand je l’ai écoutée décrire son quotidien, j’ai pensé qu’il serait vraiment intéressant de préparer une série sur ce métier invisibilisé, exercé en majorité par des femmes (90%), plutôt âgées (47% ont plus de 50 ans). J’ai lu beaucoup d’articles et de rapports, écouté des podcasts, vu le film de Gilles Perret et de François Ruffin « Debout les femmes ».
La situation de Sylvie ressemble à celle des 600 000 aides à domicile auprès des personnes âgées recensées en France et explique pourquoi le secteur fait face à une grave crise de recrutement : employée à 3/4 de temps et rémunérée au SMIC, son temps de travail est fractionné et réalisé sur une grande amplitude horaire qui la tient absente de chez elle de 8 h à 18 h. Ses frais de transport sont mal indemnisés, ce qui la contraint à déjeuner dans sa voiture. « Au froid l’hiver, au chaud l’été », dit-elle. Les tâches de ménage sont fatigantes. A 57 ans, aucune évolution ne lui sera proposée. Elle est cependant attachée à ce métier qu’elle avait pourtant rejoint par nécessité.
Je suis très heureuse qu’elle m’ait donné l’occasion de l’écouter. J’ai éprouvé une grande reconnaissance pour elle et pour toutes ces femmes qui se rendent au domicile des personnes âgées pour effectuer des tâches quotidiennes, répétitives et indispensables. Avec la plus grande conscience professionnelle, malgré leurs salaires et leurs conditions de travail. Rappelons que les personnes en perte d’autonomie (bénéficiaires de l’APA, allocation pour perte d’autonomie) sont 1,387 million en 2020 et seront 1,479 million en 2025.
Il y a urgence. Dans le prochain épisode, qui sera publié le 18 décembre, nous écouterons la suite de l’interview de Sylvie, ce qui nous permettra d’interroger certains aspects de l’avenir de cette profession : quel est l’impact des mesures financières annoncées en septembre dernier ? où en sont les programmes de formation initiés dans le secteur ? des changements d’organisation du travail permettraient-ils une meilleure qualité de soins et une meilleure qualité de vie des professionnelles ?